Thèse de Thomas Pigeon : « Méthodes d’échantillonnage d’évènements rares et machine learning pour l’étude des mécanismes de réaction catalytiques »
La compréhension des propriétés chimiques des supports (alumine-gamma notamment) et phases actives des catalyseurs hétérogènes représente un défi nécessitant la description fine de systèmes à l’échelle atomique et la quantification d’événements rares à cette échelle : les réactions chimiques.
Le calcul quantique apparaît alors comme un outil pertinent pour tenter de relever ce défi. Toutefois, une amélioration continue des méthodologies numériques et des modèles atomistiques est nécessaire pour déterminer la structure complexe des sites actifs, d’une part, et leur réactivité (constante de vitesse), d’autre part. En couvrant tous ces aspects, ce travail de thèse a apporté des réponses à ce double enjeu, tout en explorant les apports d’algorithmes d’apprentissage machine (ML1).
La théorie de l’état de transition (TST2) surestime nécessairement la réactivité. Cette dernière est très souvent couplée à une approximation harmonique de la surface d’énergie potentielle (hTST), impliquant une seconde source d’incertitude sur le calcul de constante de vitesse. Pour pallier ces difficultés, une approche alternative a été mise en œuvre pour calculer directement des constantes de vitesses de réaction. Cette approche combine une méthode de simulation d’évènements rares (AMS3) avec de la dynamique moléculaire ab initio (AIMD4), implémentée avec un logiciel quantique (VASP5) largement utilisé par la communauté (Figure 1a).
Les outils de Machine Learning (SVM [1], Auto-Encodeurs [2]) ont permis, en premier lieu, l’identification de variables collectives (CVs) servant à définir automatiquement le progrès de l’AMS au cours d’une réaction (Figure 1b). Ils ont de plus servi à la construction d’un champ de forces interatomiques grâce auquel les calculs AIMD ont été accélérés. Certaines de ces méthodes ont ainsi permis d’évaluer les constantes de vitesses de rotation et de dissociation d’une molécule d’eau sur la surface (100) de l’alumine-gamma [1]. Ces constantes s’avèrent être jusqu’à 2 ordres de grandeur inférieures à celles obtenues par l’approche hTST, pointant l’ampleur possible des erreurs générées par cette dernière [1].
Parallèlement, en vue d’une description plus fine des sites actifs présents sur les cristallites d’alumine-gamma, plusieurs modèles complexes de facettes [3] et d’arêtes ont été élaborés [4]. Ceux-ci ont permis une interprétation plus précise des spectres expérimentaux RMN6 du proton (Figure 1c). Les calculs ab initio ont notamment conduit à l’identification de sites localisés sur les arêtes, non inventoriés jusqu’ici.
Ces travaux, réalisés dans le double contexte de l’accord cadre INRIA-IFPEN et de la chaire ENSL-IFPEN ROAD4CAT, se prolongent aujourd’hui dans le cadre du projet MAMABIO relevant du PEPR B-BEST.
1- Machine Learning
2- Transition State Theory
3- Adaptive Multilevel Splitting
4- Ab Initio Molecular Dynamics
5- Vienna Ab-initio Simulation Package
6- Résonance Magnétique Nucléaire
Références :
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T. Pigeon, G. Stoltz, M. Corral-Valero, A. Anciaux-Sedrakian, M. Moreaud, T. Lelièvre, P. Raybaud, Computing Surface Reaction Rates by Adaptive Multilevel Splitting Combined with Machine Learning and Ab Initio Molecular Dynamics, J. Chem. Theory Comput. 2023, 19, 12, 3538–3550
>> https://doi.org/10.1021/acs.jctc.3c00280
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T. Lelièvre, T. Pigeon, G. Stoltz, W. Zhang, Analyzing Multimodal Probability Measures with Autoencoders, J. Phys. Chem. B, 2024, 128, 11, 2607–2631
>> https://doi.org/10.1021/acs.jpcb.3c07075
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T. Pigeon, C. Chizallet, P. Raybaud, Revisiting γ-alumina surface models through the topotactic transformation of boehmite surfaces, J. Catal. 2022, 405, 140-151
>> https://doi.org/10.1016/j.jcat.2021.11.011
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A. T. F. Batista, T. Pigeon, J. Meyet, D. Wisser, M. Rivallan, D. Gajan, L. Catita, F. Diehl, A-S. Gay, C. Chizallet, A. Lesage, P. Raybaud, Structure, Location, and Spatial Proximities of Hydroxyls on γ-Alumina Crystallites by High-Resolution Solid-State NMR and DFT Modeling: Why Edges Hold the Key, ACS Catal. 2023, 13, 10, 6536–6548
>> https://doi.org/10.1021/acscatal.3c00495
Contacts scientifiques : thomas.pigeon@ifpen.fr et Pascal Raybaud