16.09.2020

3 minutes de lecture

FacebookTwitterLinkedInImprimer

Encouragé par le projet de Programmation Pluriannuelle de l’Energie, le déploiement croissant de l’énergie éolienne soulève de nouvelles problématiques. Pour y répondre, IFPEN a développé en partenariat avec Météo France un outil numérique capable d’une modélisation hautement réaliste.

De nouveaux enjeux pour l’énergie éolienne

Le premier enjeu réside dans le fait qu’à l’avenir de plus en plus de parcs s’orienteront vers des terrains montagneux et offshore (en mer), en complément des terrains plats jusqu’à présent privilégiés. La prévision et l’optimisation de la production énergétique pour ces types d’implantation nécessite une meilleure compréhension de l’écoulement du vent au sein des fermes d’éoliennes.

Le second a trait à la taille des éoliennes offshore : de plus en plus grandes, elles seront amenées à interagir plus fortement avec l’atmosphère et donc avec la météorologie locale. Dès lors, il importe de pouvoir caractériser ces interactions.

La réponse du partenariat IFPEN - Météo France : un nouvel outil de simulation

Pour répondre à ces deux enjeux, respectivement industriel et environnemental, IFPEN et Météo France ont créé, dans le cadre d’un partenariat, un nouvel outil numérique. Développé lors d’un travail de thèse [1], le logiciel propose un couplage entre des modèles aérodynamiques d’éoliennes et Meso-NH, le modèle météorologique à maille fine développé conjointement par le CNRM (Météo France) et le Laboratoire d’Aérologie. 

Ce dernier modélise dans un premier temps la couche limite atmosphérique1 de manière réaliste en prenant en compte une multitude de phénomènes physiques tels que le relief, le type de surface, les nuages, la pluie, et même la foudre. La simulation de l’interaction entre les efforts aérodynamiques des pales et le vent au sein de la couche limite atmosphérique (CLA) permet ensuite de reproduire l’écoulement autour des éoliennes ainsi que leur sillage (Figure 1)
 

schema couplage numérique d'une simulation éolienne
Figure 1 : Schématisation du couplage numérique 


1 Partie de l’atmosphère où la présence de la surface terrestre (continentale ou océanique) est directement sensible

Un outil validé à différentes échelles

La programmation et la mise au point du couplage achevées, les équipes partenaires ont conduit différentes étapes de validation afin de vérifier la pertinence du modèle mais aussi de connaître les limites de l’outil en confrontant ses résultats numériques avec l’expérience. 

Le travail de validation a alors été mené à différentes échelles, pour des résultats concluants : le logiciel permet aussi bien de simuler le sillage lointain d’un parc en interaction avec une colline , que le sillage proche en aval de chaque pale d’une éolienne  (Figure 2) [2].

 

visualisation un sillage éolienne
Figure 2 : Visualisation 3D du sillage de l'éolienne Mexico


Une enquête atmosphérique au service du réalisme

Enfin, la dernière étape a consisté à vérifier la capacité de l’outil à reproduire des phénomènes météorologiques complexes dans le cadre d’une étude de cas soigneusement choisie : une formation nuageuse au sein du parc offshore Horns Rev 1 au large du Danemark. Deux photos prises depuis un hélicoptère (Figures 3.A et 4.A) ont notamment permis de capturer le phénomène bien connu par la communauté scientifique. 
 

ferme d'éoliennes avec leurs sillages
Figure 3 : A. Photo vue de face du parc de Hors Rev (Vattenfall ; Photo : Christian Steiness). B. Simulation numérique [4]


Pour déterminer les conditions atmosphériques à l’origine du phénomène, les équipes partenaires ont mené une véritable enquête en s’appuyant sur la date et l’heure à laquelle la photographie avait été prise ainsi que sur des données collectées dans le cadre d’une étude réalisée en 2013 [3] qu’elles ont complété par l’analyse de données supplémentaires en provenance de la NASA notamment.

La reproduction d’une atmosphère réaliste autour du parc éolien, couplée à la simulation numérique de ce dernier (Figures 3.B et 4.B.), a abouti à la création et à l’étude de la formation nuageuse derrières les éoliennes [4].

Un outil prometteur 

Ce nouvel outil numérique, bientôt open-source, élargit le champ des possibles pour la simulation numérique de parcs éoliens, en proposant une modélisation hautement réaliste. 

Il est d’ores et déjà utilisé par IFPEN pour calibrer les modèles d’optimisation d’agencement des éoliennes ainsi que pour étudier les interactions entre les parcs et la météorologie locale (comme les effets de la stabilité atmosphérique sur la production).

Références :

 [1] Joulin, P-A., Modélisation à fine échelle des interactions entre parcs éoliens et météorologie locale. 2019. Thèse de doctorat soutenue le 13-12-2019 à Toulouse, INPT.
[2] Joulin, P. A., Mayol, M. L., Blondel, F., Masson, V., Rodier, Q., & Lac, C. (2019, July). Coupling the actuator line method to the high order meteorological LES model Meso-NH to study wind farm wakes impacts on local meteorology. In Journal of Physics: Conference Series (Vol. 1256, No. 1, p. 012019). IOP Publishing.
[3] D : Hasager, C. B., Rasmussen, L., Peña, A., Jensen, L. E., & Réthoré, P. E. (2013). Wind farm wake: The Horns Rev photo case. Energies, 6(2), 696-716.
[4] Joulin, P. A., Mayol, M. L., Masson, V., Blondel, F., Rodier, Q., Cathelain, M., & Lac, C. (2020). The Actuator Line Method in the meteorological LES model Meso-NH to analyze the Horns Rev 1 wind farm photo case. Frontiers in Earth Science, 7, 350.

 

Contact scientifique : P-A Joulin