06.01.2017

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Les zéolithes sont des matériaux oxydes, à base de silicium et d’aluminium, qui présentent un intérêt majeur dans le domaine de la catalyse hétérogène et dont les propriétés peuvent être modulées par la présence de défauts structuraux. L’intérêt de ces aluminosilicates comme catalyseurs provient du fait qu’ils présentent des pores de dimensions moléculaires (jusqu’à deux nanomètres de diamètre), dits micropores, et des cations de compensation de charge (a) qui, lorsqu’ils sont des protons, confèrent à la zéolithe des propriétés acides de Brønsted (b).

La désalumination des zéolithes (abstraction des atomes d’aluminium de réseau) par traitement à la vapeur d’eau (steaming) est une opération post-synthétique très courante, employée pour ajuster l’acidité de Brønsted du solide à un niveau modéré, pour le stabiliser, et également pour générer des mésopores (plus grands que les micropores, jusqu’à 50 nm de diamètres). Ces mésopores jouent un rôle présumé dans la transformation de molécules hydrocarbonées qui sont de trop grande taille pour accéder aux micropores. C’est notamment le cas dans le procédé d’hydrocraquage, qui a pour objectif de produire des carburants diesels et du kérosène de bonne qualité à partir d’hydrocarbures lourds.

Les mécanismes de la désalumination sont toutefois méconnus à l’échelle moléculaire, ce qui rend difficile leur contrôle dans un contexte de production [1]. Cependant, par des calculs à l’échelle atomique, en utilisant du calcul quantique ab initio, des chercheurs d’IFP Energies nouvelles, en collaboration avec l’Université Humboldt de Berlin, ont élucidé le mécanisme des toutes premières étapes de la désalumination pour plusieurs zéolithes.

Cette étude explique comment la première molécule d’eau permettant l’extraction d’un atome d’aluminium doit s’y coordonner selon une orientation précise, en position anti du site acide de Brønsted (deux figures de gauche, ci-dessous) [2]. L’aptitude du site aluminique à être extrait dépend donc des contraintes stériques dans cette orientation d’approche. Par la suite, l’atome d’aluminium partiellement délogé de sa position cristallographique devient un EFAL (Extra-Framework Aluminum), grâce à la participation d’au moins trois molécules d’eau supplémentaires, et selon des mécanismes pouvant être plus complexes que l’approche de la toute première molécule d’eau [3]. De plus, un second paramètre contrôlant l’extraction est la stabilisation de l’EFAL dans le pore qui l’héberge (exemple du canal 12MR (c) de la mordénite sur la figure de droite).

En permettant d’anticiper la localisation des sites susceptibles d’être désaluminés en fonction de la nature de la zéolithe [3], l’évaluation ab initio des énergies libres d’activation du mécanisme fournit des guides à l’obtention de catalyseurs plus performants.

Schema-atome-d-aluminium-de-la-charpente-de-la-zeolithe-mordenite.jpg

(a) Dans une zéolithe comportant des ions aluminium, une espèce Al3+ (formellement chargée 3 fois) remplace un ion Si4+. Le solide étant une entité électriquement neutre, chaque Al3+ est donc accompagné d’un cation chargé une fois positivement par exemple, pour compenser la charge induite par la substitution.
    
(b) Capacité à céder un proton H+.
    
(c) Canal 12MR : pore monodimensionnel de la zéolithe en forme de cylindre, délimité par une ellipse comportant 12 atomes de silicium et/ou d’aluminium.
 


Publications

[1] Challenges on molecular aspects of dealumination and desilication of zeolites
     M.C. Silaghi, C. Chizallet, P. Raybaud
     Microporous Mesoporous Mater., 191, 82, 2014.
     >> http://dx.doi.org/10.1016/j.micromeso.2014.02.040

[2] Regioselectivity of Al-O bond hydrolysis during zeolites dealumination unified 
     by Brønsted-Evans-Polanyi relationship
     M-C. Silaghi, C. Chizallet, E. Petracovschi, T. Kerber, J. Sauer, P. Raybaud
     ACS Catalysis, 5, 11-15, 2015.
     >> http://dx.doi.org/10.1021/cs501474u

[3] Dealumination mechanisms of zeolites and extra-framework aluminum confinement
     M-C. Silaghi, C. Chizallet, J. Sauer, P. Raybaud
     J. Catal., 339, 242-255, 2016.
     >> http://dx.doi.org/10.1016/j.jcat.2016.04.021