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La baisse des émissions de CO2 provenant des véhicules routiers est nécessaire pour réduire durablement les émissions globales de gaz à effet de serre (GES) en France. En effet, le secteur du transport représente encore plus de 30 % de la part des émissions nationales, ce qui en fait le secteur le plus émetteur du pays. Le développement de nouvelles motorisations bas carbone pourrait de plus permettre d’améliorer la qualité de l’air et de diminuer notre dépendance aux énergies fossiles importées.

Afin de comparer les différentes technologies disponibles, matures ou futures, pour le transport routier, IFPEN, avec le soutien de l’ADEME, a réalisé l’étude E4T 2040 de prospective économique et environnementale de ce secteur [1] et développé pour cela des méthodes et des outils permettant de réaliser les analyses requises suivant une approche multi-échelle.

Ces analyses ont dans un premier temps été menées à l’échelle du véhicule, avec l’étude d’une multitude de segments, allant de la citadine au poids lourd articulé, en fonction de plusieurs conditions d’usage mêlant des parcours urbains et extra-urbains. A partir d’hypothèses portant sur l’évolution des technologies de propulsion, les résultats de consommation et d’émission pour chaque type de véhicule ont été déterminés et projetés jusqu’en 2040.

Dans un second temps, ces résultats économiques et environnementaux ont nourri un modèle de choix discrets emboîtés1, DRIVERS (DiscRete choIce modeling for low-carbon VEhicles fleet scenaRioS), lequel a permis de transposer ces analyses à l’échelle des parcs de véhicules en circulation. Le modèle DRIVERS permet ainsi de réaliser différentes projections de la demande de transport routier, globale ou par type de technologie, en fonction de plusieurs scénarios de politiques publiques, et d’en déduire les émissions polluantes associées.

Cette méthodologie, déployée pour l’étude E4T 2040, a été développée par IFPEN dans le cadre d’un projet de recherche dédié. Pour la partie environnementale, les développements méthodologiques avaient plus particulièrement porté sur les indicateurs Analyses du Cycle de Vie (ACV) liés aux véhicules [2]. Quant au nouveau modèle prospectif de parc DRIVERS, sa fonction d’utilité2 intègre une première partie liée aux coûts de possession des véhicules et une seconde partie liée aux comportements des agents économiques. Cette seconde partie a bénéficié de travaux plus fondamentaux en économie comportementale [3].

Les résultats obtenus grâce à ces nouvelles approches montrent que les progrès techniques, conjugués à la baisse de coût des solutions électriques (notamment à batterie), vont leur permettre de pénétrer le marché. L’ACV montre qu’avec le mix électrique français le passage aux véhicules électriques à batterie produit des gains très nets d’émissions de GES, les émissions liées à la production des batteries ayant tendance à diminuer d’ici 2040 du fait de la relocalisation de leur production en Europe à cet horizon (Figure 1).
 

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Figure 1 : Impacts potentiels sur le changement climatique pour les véhicules du segment C.
Cycles de conduite WLTC .
Horizons temporels 2020 et 2040 (12 500 km/an)

Enfin, à l’horizon 2050, l’analyse prospective de l’évolution du parc automobile français indique que, même avec le scénario le plus favorable à la vente de véhicules électriques à batterie, les objectifs du Green Deal (- 90 % d’émissions de CO2 du parc en 2050 par rapport à 1990) ne peuvent être atteints (Figure 2). Il résulte de ces projections que, sauf utilisation accrue des biocarburants et changements en profondeur des comportements de mobilité via des mesures de politiques publiques d’accompagnement adéquates3, cet objectif de décarbonation affiché pour le secteur des transports sera difficile à atteindre.
   

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Figure 2 : Évolution temporelle des émissions de CO2 à l’échappement pour le parc des véhicules légers (à gauche), et déclinée par technologie (à droite) pour les scénarios C8 (pro-électriques) avec et sans interdiction de vente des véhicules thermiques après 2035.

  

1- Type de modèle très utilisé en économie du transport pour déterminer la probabilité des usagers à se positionner sur des alternatives, en s’appuyant sur des fonctions d’utilité.
2- Fonction mathématique visant à traduire quantitativement le concept d’utilité afin de l’intégrer dans un modèle de choix.
3- Autopartage, développement des transports en commun et de l’intermodalité, mobilités douces, etc.
   


Références :

  1. Etude énergétique, économique et environnementale du transport routier à horizon 2040 (E4T 2040), IFPEN-ADEME, 2022. 126 pages.
    >> https://librairie.ademe.fr/mobilite-et-transport/5949-etude-energetique-economique-et-environnementale-du-transport-routier-a-horizon-2040-e4t-2040.html
      

  2. Ternel C., Bouter A., Melgar J., Life cycle assessment of mid-range passenger cars powered by liquid and gaseous biofuels: Comparison with greenhouse gas emissions of electric vehicles and forecast to 2030, Transportation Research Part D, Vol. 97, 2021.
    >> https://doi.org/10.1016/j.trd.2021.102897
      

  3. Thèse en cours d’Alexandre Cambo : Modélisation de la demande de transport routier européen et de ses impacts environnementaux pour les véhicules particuliers à l'horizon 2040.
          

Contacts scientifiques : Benoît Cheze ; xavier.guichet@ifpen.fr ; joris.melgar@ifpen.fr

>> NUMÉRO 51 DE SCIENCE@IFPEN